Il n’y a pas de miracle : vous ne pouvez pas compter bâtir un business dans lequel vous encaisserez tous les bénéfices sans le moindre investissement personnel, et sans prendre le moindre risque. Vous ne pourrez pas repasser la totalité de l’effort d’investissement financier et ses risques associés à vos banquiers.

La société anonyme est un excellent instrument qui vous permet de limiter votre risque à votre apport en capital, mais sous certaines conditions que nous développerons. Et par la suite, la société anonyme vous permet aussi de lever des fonds sans consentir de garantie supplémentaire,
mais dans la limite de ses réserves (cumul des bénéfice réalisés non distribués). En revanche, si vous souhaitez emprunter plus de fonds que le montant total des capitaux propres, votre banquier devrait normalement vous demander des garanties.
A quelques nuances près, le même constat est valable pour les SAS(U), Sociétés Anonymes Simplifiées (à Actionnaire Unique) et les SARL, Sociétés à Responsabilité Limitée.
La SA permet de limiter son risque
Par définition la SA est une Société Anonyme. C’est à dire que ses actionnaires ne sont pas connus officiellement et donc que leur responsabilité ne peut pas être recherchée en cas de pertes, sauf bien sûr cas de fraudes ou de fautes de gestion.
Par conséquent, un actionnaire qui investit 100 € dans une SA limite son risque total à la perte de ces 100 €.
Ce risque s’accroît bien sûr à mesure que les capitaux propres augmentent des bénéfices non distribués donc réinvestis. Par exemple, après cinq ans de bénéfices non distribués à raison de 20 € par an, les capitaux propres de la SA, pour la part de notre actionnaire, représenteront 200 €. En cas de liquidation, il peut donc perdre ces 200 €.
Si en revanche, les actionnaires décident de distribuer la totalité des bénéfices, alors les capitaux propres resteront à 100 € pour notre investisseur et son risque aussi.
La limite des risques est en pratique … limitée : certains événements peuvent faire sauter l’anonymat !
Il convient d’être très attentif aux différents événements qui peuvent faire sauter l’anonymat donc l’étanchéïté de la SA en matière de risque financier pour ses dirigeants. En pratique, il s’agit de deux types d’événements :
- le fait de consentir des garanties personnelles de l’actionnaire ;
- le fait de ne pas respecter les principes de fonctionnement de la SA, qu’ils soient de formalisme ou de gestion prudente en bon père de famille, dans l’intérêt de la société et dans le respect de ses créanciers.
La concession de garanties par l’actionnaire peut et doit toujours être limitée
Quand vous souhaitez emprunter au-delà de vos capitaux propres, le banquier se trouve sérieusement en risque et devrait probablement vous demander des garanties. Ces garanties peuvent être endogènes à la SA ou exogènes. Si elles sont endogènes, comme les hypothèques sur l’immobilier ou les nantissements de stocks ou autres actifs immobilisés financés par la banque, pas de problème. Votre risque initial ne change pas et reste limité à votre apport en capital. L’anonymat fonctionne à plein.
Si en revanche, faute d’actifs en valeur suffisante, votre banquier souhaite prendre des garanties personnelles, comme une caution personnelle, il convient de bien en préciser le montant et les conditions d’appel. Votre risque total évolue en revanche pour s’établir à un montant égal à votre mise initiale plus le montant de garanties personnelles consenties. Attention donc à rester dans une enveloppe globale conforme à vos possibilités et souhaits.
Cette mécanique est très dangereuse dans les phases difficiles de la vie des sociétés et concerne la majorité des dirigeants de PME. L’entrepreneur, comme un joueur au casino, tend à miser de nouveau pour ne pas perdre sa mise initiale. De fait, il accroit son risque total et sa propension à refuser l’échec avec in fine des conséquences dramatiques. C’est un véritable cercle vicieux. Dans cette situation, il est indispensable de se faire accompagner par un œil externe neutre et bienveillant qui saura vous protéger en vous aidant à faire la part des choses entre la probabilité de sortir des difficultés et celle de ne pas y arriver, d’une part, et les conséquences concrètes dans les deux cas, d’autre part.
En effet, même dans une situation où l’entrepreneur peut, en réinvestissant, espérer sérieusement sortir une société d’un mauvais pas, il se pourrait que cette société en sorte tellement affaiblie qu’elle ne soit plus viable ou rentable pendant de très nombreuses années. Dans ce cas aussi, il peut être intéressant de tout arrêter et lancer une procédure adaptée à la situation pour repartir par la suite sur le bon pieds. Comme en sport, il faut savoir tomber suffisamment tôt pour pouvoir se relever rapidement sans se blesser.
Le respect des principes légaux, condition de l’anonymat des SA

S’il suffisait aux gangsters de constituer une SA pour aller faire un casse dans une banque, chez un fournisseur ou chez le percepteur, les Tontons Flingueurs l’auraient fait ! En pratique, le législateur a prévu un certain nombre de cas où l’anonymat et donc la protection de la SA sautent.
Les principales conditions à respecter sont :
- Formalisme et réalité de la SA : la SA doit comporter le nombre d’actionnaire minimal prévu selon sa forme (SA SAS ou SASU). Elle doit nommer son dirigeant, respecter ses propres principes de fonctionnement décrits dans ses statuts, etc.
- Respect de ses obligations : elle doit tenir une comptabilité propre, souscrire les déclarations, notamment fiscales, auxquelles elle est assujettie et régler ses dettes aux échéances convenues.
- Respect du principe de gestion en bon père de famille : elle doit prendre des risques mesurés et aussi limités que le contexte le permet. Par exemple, rester mono-client alors qu’il existe plein de clients potentiels serait une faute d’imprudence. Investir lourdement dans une nouvelle activité dont la rentabilité n’est pas du tout assurée serait aussi une faute de gestion, d’autant plus que la SA serait exsangue. Prêter de l’argent à des tiers dont on sait à l’évidence qu’ils ne sont pas solvables, aussi. Et pire, si ces tiers sont liés à la société prêteuse ou son actionnaire, Etc.
- Respect de l’intérêt social de la société : toutes les décisions prises par ses dirigeants doivent l’être dans l’intérêt de la société. Cela n’exclue bien sûr pas l’intérêt des co-contractants (clients, fournisseurs, salariés et actionnaires) ou l’accomplissement des obligations légales (impôt notamment). Mais pour tout acte de gestion, le dirigeant doit démontrer qu’il était parfaitement dans l’intérêt de la société d’y procéder. C’est à dire que globalement :
- La société y gagnait quelque chose directement (un bénéfice) ou indirectement (une meilleure notoriété suivie de bénéfices ou d’une diminution de pertes)
- L’économie du contrat était équilibrée. Ce dernier point est plus difficile à évaluer mais il part du principe qu’une des parties ne doit pas pouvoir espérer a priori un gain assuré disproportionné par rapport à ceux prévisibles pour les autres parties co-contractantes. Cela peut se résumer en termes mathématiques à : l’espérance de gain de chaque partie doit être de même ordre de grandeur, en fonction des hypothèses de prévisions connues au moment de contracter. Peu importe les événements imprévisibles qui adviendront par la suite et qui pourraient déséquilibrer l’économie du contrat.
- Respect des droits des créanciers, notamment en cas de difficultés : comme exposé dans l’article sur la structuration juridique de l’entreprise, le dirigeant d’une société ne peut pas la vider de ses actifs dans des conditions défavorables pour ses créanciers (absence de contrepartie indiscutable) ni privilégier certains créanciers. En cas de procédure collective, cela pourrait être constitutif du délit de banqueroute article L654 du Code de Commerce et d’une faute de gestion article L651 du Code de Commerce.
Les sanctions en cas de non respect

La sanction en cas de non respect volontaire de ces principes est directe : outre les sanctions pénales prévues en cas de fraude, les éventuelles sanctions conventionnelles prévues en cas de non respect de ses obligations (clauses pénale des contrats en cas d’impayés), le dirigeant fautif, qu’il soit le dirigeant
légal ou de fait, peut immédiatement être appelé à combler le passif en cas de liquidation pour le montant du préjudice entrainé par ses négligences ou fraudes. Et cette sanction peut en théorie aller jusqu’à s’appliquer au profit des autres actionnaires lésés. En pratique, de telles sanctions sont prononcées dans 5 à 10% des liquidations. Cela n’est donc pas trop fréquent, notamment en comparaison des cautions personnelles, mais autant ne pas risquer d’en faire partie.
Attention donc aux non respect des principes légaux, ils peuvent rendre illimité le risque pour les dirigeants de SA. Il convient donc de vérifier en cas de doute la légalité ou normalité de tout acte de gestion significatif et en particulier lorsqu’une entreprise est dans une phase de risques. C’est l’un des principaux objectifs de l’accompagnement du dirigeant proposé par Versailles Finance. De même, a posteriori, il reste utile de vérifier ce point même après la survenance de graves difficultés et d’apporter les correctifs quand c’est encore possible afin d’éviter les mises en causes. C’est un des objectifs importants du module de diagnostic de crise et préparation de procédure proposé par Versailles Finance. Compte tenu des sommes en risque, il serait dommage de ne pas être bien informé, bien accompagné.